Tout, tout de suite de Morgan Sportès

« Conte de faits » comme le dit l’auteur, reportage romancé… le statut de ce « roman » est difficile à cerner.

Pendant 400 pages, Mogan Sportès retrace l’itinéraire de ceux que l’on a nommés « le gang des barbares ». Comment et pourquoi ils en sont arrivés à séquestrer et tuer un jeune homme juif.

On suit mi-horrifié, mi-fasciné cette narration. Chaque chapitre commence par une citation. Extraits de presse, de chansons de rap, d’ouvrages théoriques sur la société du spectacle rythment ainsi la lecture et donne un éclairage nouveau à ces faits. On découvre alors à quel point l’inculture, l’incompréhension, la bêtise, l’absence de morale peuvent conduire aux raisonnements les plus absurdes et les plus tragiques.

J’ai été captivée par cette lecture. Certains passages sont évidemment difficiles à lire. Le décompte des jours de vie restant à Elie, le nombre de fois où l’on est passé à deux doigts de sa libération ou de l’arrestation des kidnappeurs, le fossé entre la réalité  et la façon dont les médias ont pu présenter ces jeunes (un gang, des pros de l’informatique !), tout cela reste en tête bien des jours après la fin de la lecture.

Un bémol cependant : parfois, Morgan Sportès emploie le vocabulaire de ces jeunes sans que cela soit vraiment fondé ou nécessaire.

Quatrième de couverture :

« Vous qui entrez ici, laissez toute espérance. Ce livre est une autopsie : celle de nos sociétés saisies par la barbarie.
En 2006, après des mois de coups tordus et d’opérations avortées, une petite bande de banlieue enlève un jeune homme. La rançon exigée ne correspond en rien au milieu plutôt modeste dont ce dernier est issu. Mais le choix de ses agresseurs s’est porté sur lui parce que, en tant que Juif, il est supposé riche. Séquestré vingt-quatre jours, soumis à des brutalités, il est finalement assassiné.
Les auteurs de ce forfait sont chômeurs, livreurs de pizzas, lycéens, délinquants. Certains ont des enfants, d’autres sont encore mineurs. Mais la bande est soudée par cette obsession morbide : « Tout, tout de suite. »
Morgan Sportès a reconstitué pièce par pièce leur acte de démence. Sans s’autoriser le moindre jugement, il s’attache à restituer leurs dialogues confondants d’inconscience, à retracer leur parcours de fast-foods en cybercafés, de la cave glaciale où ils retiennent leur otage aux cabines téléphoniques d’où ils vocifèrent leurs menaces, dans une guerre psychologique avec la famille de la victime au désespoir et des policiers que cette affaire, devenue hautement « politique », met sur les dents.
Indigence intellectuelle et morale au milieu de l’indigence architecturale et culturelle : il n’y a pas de mot pour décrire l’effroyable vide que la société a laissé se creuser en son sein, et qui menace de l’aspirer tout entière. Pas de mot. Il fallait un roman.
Il y a vingt ans, Morgan Sportès signait L’appât, roman dont l’adaptation au cinéma par Bertrand Tavernier reçut l’Ours d’or à Berlin. »

Une réflexion sur “Tout, tout de suite de Morgan Sportès

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