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Samba pour la France de Delphine Coulin

Voilà un roman magnifique.

Samba débarque en France plein d’espoir. La patrie des droits de l’homme l’accueillera sûrement à bras ouverts, lui permettra de réaliser ses rêves, d’aider les siens restés au pays. Lui qui parle français depuis toujours, qui a obtenu son bac, comment pourrait-il échouer dans cet Eldorado ?

Après 10 ans passés sur le territoire, Samba va à la préfecture et y est arrêté. Lui qui vit honnêtement, qui paie ses impôts, qui sait se montrer discret et travailleur, il est traité alors comme un moins que rien.

A l’aide de bénévoles, il est libéré mais, rien n’est gagné. Il lui faudra chaque jour faire preuve de ruse, de mensonge pour échapper à ce qui l’attend : un retour forcé au pays.

Delphine Coulin peint admirablement la vie de ces hommes et ces femmes qui se battent pour rester sur un territoire qui ne veut pas d’eux, une France « rassise » comme le dit l’oncle de Samba. Tous ces personnages sont emplis de rêves qu’ils devront peu à peu délaisser, perdre pour tenter d’avancer. Elle dit aussi la violence, les viols, les persécutions, la misère que ces hommes et ces femmes ont connus dans leur pays d’origine. Elle ne tait rien des crimes commis par certains passeurs. Elle met en lumière ceux qui doivent se taire, travailler la nuit, dans l’ombre pour que tout fonctionne autour d’eux mais pas pour eux.

Ce roman est à lire absolument.

« Lorsqu’il avait été enfin seul, et libre, en descendant de l’autocar qui l’avait emmené du sud de l’Espagne au nord de la France, Samba avait regardé autour de lui et c’était la France, c’était Paris, alors il avait marché, marché le long des bâtiments du passé. Ses chaussures étaient minables et trouées, mais le ciel était jaune, les murs brillaient dans la lumière du soleil qui tombait, et il était au centre du monde. Il savait que cela ne durerait peut-être pas, mais il était heureux d’être là, et cela rendait ces minutes encore plus précieuses.

Dix ans plus tard, il était toujours ébloui par la lumière des quais.

Même derrière les barreaux, même les menottes aux poignets, il aimait la France.

C’était un patriote. »